Dans les années 1980, Patrick Edlinger, que l’on surnommait « Le Blond » a peint avec la grâce d’un poète le premier chapitre de l’histoire mondiale de l’escalade libre. Entre ses mains, l’exercice marginal devint un véritable style de vie, porteur d’un message de liberté. Ses célèbres solos, au-delà de l’exploit intrinsèque qu’ils représentent, en témoignent. La Vie au bout des doigts, le premier film d’escalade internationalement connu, a touché et inspiré des générations de grimpeurs, comme moi, qui suis pourtant né des années plus tard. Edlinger fut un des météores qui mirent de la lumière sur les falaises du monde en suivant la trajectoire d’une seule idée : être libre de ne vivre que de « grimpe ». Pourtant l’homme fit des concessions face aux nécessités de la vie (compétitions, publicités) et aux pressions des médias, de son public et des convoitises qu’il suscitait. Sa vie fut traversée par des conflits intérieurs intenses qui le conduisirent du plus haut au plus bas. Sa vie a suscité des questions mais aussi des controverses dans les années 80/90. Pour ceux de ma génération, qui n’ont pas connu le blond au temps de sa gloire, vivre dans un van en pleine nature, grimper seul une voie vertigineuse et avare en prises en prenant soin de se mouvoir avec une concentration et une grâce infinie est une source d’inspiration, même si cela ne peut faire oublier les zones d’ombres. Je l’ai appris en préparant ce film : Edlinger n’était pas qu’un mythe mais aussi un homme complexe qui devait vivre avec ses démons. C’est cet «ovni» qui est au cœur de mon film, un personnage étonnant que je voudrais rencontrer et faire rencontrer à tous ceux qui se laissent volontiers emporter par les destins singuliers.